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Charles Ngando Black
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Introduction
Dans l’imaginaire collectif, la gouvernance des données est généralement perçue comme une initiative stratégique, orientée vers la vision à long terme de l’organisation. Elle est dans ce contexte associée à des objectifs larges comme la transformation digitale, la conformité réglementaire et la sécurité des informations. Toutefois, cette vision stratégique n’est pas toujours l’unique point de départ. En réalité, les approches tactiques et opérationnelles peuvent exister de manière autonome et précéder une initiative stratégique formelle.
Des équipes peuvent adopter des pratiques de gouvernance des données pour résoudre des problématiques spécifiques ou pour optimiser leurs processus métier. Ces initiatives locales, bien qu’isolées, peuvent constituer les fondations d’une gouvernance des données plus large. De même, des approches opérationnelles peuvent émerger pour répondre à des besoins immédiats, comme la gestion quotidienne des données ou la résolution d’incidents sur les données.
Cet article examine les trois approches – stratégique, tactique et opérationnelle – en reconnaissant que, contrairement à une idée largement répandue, les niveaux tactiques et opérationnels ne sont pas toujours subordonnés à la stratégie. Ils peuvent être des initiatives indépendantes, à court ou moyen terme, qui finissent par préparer le terrain pour une gouvernance stratégique plus formalisée. L’article explore la manière dont ces dimensions s’articulent et la manière dont elles peuvent fonctionner de manière autonome avant d’être intégrées dans une vision stratégique à long terme.
Initiative opérationnelle autonome
Un service financier peut avoir besoin de corriger rapidement des erreurs dans les flux de données comptables pour garantir la fiabilité des opérations. De même, un département marketing peut vouloir nettoyer des bases de données clients afin d’améliorer la qualité des campagnes ciblées. Dans le même sens, un service logistique peut rencontrer des anomalies dans ses bases de données de suivi de stocks, affectant la gestion quotidienne. La récurrence de ces problématiques justifie la mise en place d’un dispositif durable pour mieux piloter la gestion des données et améliorer l’efficacité opérationnelle.
Dans ce cadre, le rôle de data steward émerge. Il est chargé de superviser les flux de données et de garantir leur qualité. La gestion des incidents de qualité des données devient un processus essentiel. Sur le plan technique, elle peut être assurée par un administrateur technique qui préfigure le rôle de data custodian.
À ce stade, il n’y a pas souvent de comité de gouvernance dédié spécifiquement à la qualité des données. Mais, le suivi de la qualité est intégré au sein d’un comité métier existant. Celui-ci assure un suivi régulier et effectue les arbitrages nécessaires. Il s’aide parfois de tableaux de bord sur la qualité des données.
Bien qu’une telle initiative permette d’améliorer la qualité des données au sein d’un périmètre, elle ne permet pas d’éliminer les silos de données préexistants. Elle améliore uniquement la situation dans le périmètre gouverné. Dans ces conditions, le périmètre sous gouvernance produira des données propres et fiables ; mais il risque souvent de réceptionner des données de moins bonne qualité en provenance de périmètres qui ne sont pas sous gouvernance.
Cette disparité dans la qualité des données au sein de l’organisation entraîne des inefficacités dans les processus interservices. Elle limite la portée de l’initiative opérationnelle à son propre périmètre, sans effet externe.
Plus généralement, une initiative opérationnelle de gouvernance des données prend forme lorsqu’un service ou un département ressent le besoin d’améliorer la gestion des flux de données pour optimiser ses processus opérationnels ou décisionnels.
L’amélioration de l’efficacité opérationnelle est le principal moteur d’une initiative opérationnelle. Elle vise à réduire les délais de traitement des données et à garantir la disponibilité des données conformément aux exigences de services pour mieux répondre aux besoins des utilisateurs finaux. L’instauration d’un langage commun entre les équipes techniques et métiers facilité la communication, la coordination et l’efficacité opérationnelle globale.
Dans cette initiative, les processus sont orientés vers des résultats à court terme. Les données sont collectées, nettoyées et validées régulièrement afin de garantir leur qualité. Un système de surveillance continue permet de détecter les anomalies et de les corriger rapidement. Ces actions sont supervisées par des data stewards, qui sont responsables de la gestion des flux de données, et des administrateurs techniques, chargés de la gestion technique des systèmes. Les décisions se prennent souvent au niveau local. En s’appuyant sur un langage partagé, ces processus de gouvernance favorisent une réactivité accrue face aux incidents et facilitent une prise de décision rapide et efficace.
L’initiative opérationnelle de gouvernance des données s’appuie souvent sur des outils tels que des systèmes d’ETL (Extraction, Transformation, Loading), des logiciels ou applications de gestion de la qualité des données, etc. Des tableaux de bord en temps réel permettent de surveiller les flux de données et d’identifier rapidement les incidents ou les problèmes liés à la qualité des données. Ces outils renforcent l’efficacité du service ou du département concerné.
Bien que l’initiative opérationnelle améliore la qualité des données dans un périmètre donné, elle n’a généralement pas d’impact global sur l’organisation. Les départements non concernés peuvent continuer à utiliser des données de qualité inférieure, limitant ainsi l’efficacité des processus interdépartementaux. La dépendance à des sources externes de moindre qualité peut aussi poser des problèmes, même si des protocoles de validation internes peuvent atténuer ce risque. Enfin, sans supervision centrale ni standardisation, il existe un risque de fragmentation des pratiques entre les services, ce qui compliquera une future intégration dans une stratégie plus large de l’entreprise.
Bien que les initiatives opérationnelles améliorent la qualité des données localement, elles ne réduisent pas les silos, car elles répondent aux besoins spécifiques d’un département sans alignement global. Cette fragmentation contribue à maintenir une multiplicité de pratiques, ce qui peut compliquer une future intégration. Dans un environnement où les exigences en matière de conformité et de sécurité des données augmentent, cette approche peut également poser des défis de centralisation, de traçabilité et de protection des données, surtout si les autres départements adoptent des standards différents.
En outre, le passage d’une initiative opérationnelle à un cadre tactique ou stratégique requiert la reconnaissance des impacts transversaux des données et la mise en place de mécanismes de coordination interservices. Cela peut inclure l’ajout d’une documentation commune ou l’unification des systèmes de gestion des données entre les départements concernés, préparant ainsi le terrain pour une gouvernance élargie sans perdre en efficacité locale. Cette transition est souvent facilitée par l’instauration progressive d’une culture de la donnée dans les services visés. (1)
Initiative tactique autonome
Dans une banque, les départements de la comptabilité et de la gestion des risques doivent harmoniser leurs données pour faciliter la consolidation des rapports financiers. Une entreprise de distribution doit standardiser les pratiques de gestion des stocks entre ses centres logistiques pour éviter des retards de livraison. Dans un cas comme dans l’autre, l’efficacité de processus transverses est affectée et risque de rester compromise sans la mise en place d’un dispositif de prévention et de curation.
Les incohérences dans les définitions, formats, nomenclatures, référentiels, modèles de données, ou processus peuvent compromettre l’efficacité des processus transverses, qu’il s’agisse de la consolidation des rapports financiers dans une banque ou de la gestion des stocks dans une entreprise de distribution. L’instauration d’un langage commun, basé sur l’harmonisation des définitions, nomenclatures, et référentiels, garantit une compréhension partagée des données. Cette harmonisation facilite la communication entre les équipes et améliore les échanges entre systèmes. La standardisation des données, en uniformisant formats et structures, contribue à renforcer la qualité des données, à réduire les erreurs et à optimiser les processus transverses (consolidation des rapports financiers pour la banque et gestion distribuée des stocks pour l’entreprise de distribution).
Pour assurer le succès du dispositif de gouvernance des données, il est nécessaire de définir des responsabilités claires au sein des entités concernées. Celles-ci couvrent la définition de la connaissance commune des données et la gestion des incidents. Un comité représentatif doit être constitué pour valider les standards, suivre les flux de données, et résoudre les incidents. Il veille à la bonne mise en œuvre des décisions et contribue à l’amélioration continue de la gouvernance des données.
Plus généralement, une initiative tactique de gouvernance des données intervient lorsque plusieurs entités organisationnelles (départements, services, centres de profit, lignes métier, etc.) doivent améliorer leurs processus métiers. Bien qu’elle couvre un périmètre plus large que les initiatives strictement opérationnelles, elle n’implique pas toute l’organisation.
Le succès de cette initiative repose sur plusieurs leviers. D’abord, l’harmonisation des définitions, des référentiels et des modèles de données permet de créer un langage commun et de garantir une compréhension partagée et une cohérence dans l’utilisation des données. Ensuite, la standardisation des formats et structures joue un rôle clé dans l’amélioration de la qualité et de la fiabilité des données utilisées dans les processus critiques (collecte, organisation ou utilisation des données). Enfin le renforcement de la coordination entre les équipes métiers et techniques assure une meilleure synchronisation des efforts et une application cohérente des standards définis.
Au sein de cette initiative, les rôles de data steward et de data custodian prennent une dimension transversale. Le data steward voit sa mission élargie à la supervision de la qualité des données sur plusieurs entités, tandis que le data custodian est responsable à la fois de la gestion des systèmes de données et des échanges entre ces systèmes. Ces équipes collaborent étroitement avec un comité transversal, qui assure la supervision des progrès, veille à l’application des standards et prend des décisions visant à améliorer l’efficacité des processus transverses. Ce comité, garant de la cohérence globale, se base sur des critères tels que la qualité des informations, l’efficacité des flux et la réduction des coûts. (8)
Les livrables de l’initiative tactique incluent des modèles de données standardisés, qui assurent une structuration harmonisée entre les différents services, ainsi que des dictionnaires de données et glossaires qui définissent clairement les termes métiers pour faciliter une compréhension partagée. Les tableaux de bord jouent un rôle clé dans le suivi des performances et permettent de surveiller à la fois la qualité des données et l’efficacité des processus transverses. Cette liste est complétée par des standards de qualité des données qui formalisent des règles garantissant la cohérence et la fiabilité des données utilisées à travers l’organisation.
Plusieurs solutions technologiques viennent souvent soutenir ces efforts. Les outils de gestion des données de référence (MDM) centralisent les données critiques et assurent leur qualité et leur cohérence à travers les départements. Les plateformes de catalogage et de gouvernance des données, telles que Collibra ou Informatica, permettent de documenter, de partager et de suivre l’application des standards, le partage de la connaissance des données visant à assurer une meilleure intégration (solutions ETL ou DQM par exemple) et utilisation (solutions d’analyse et de visualisation) des données. (12)
Les bénéfices de cette initiative se traduisent par une meilleure efficacité des processus transverses, en grande partie grâce à l’harmonisation des pratiques et à l’amélioration de la qualité des données. En renforçant la collaboration entre les équipes via l’utilisation d’un langage commun, l’organisation devient plus agile et capable de répondre rapidement aux nouvelles exigences. Cette initiative tactique peut aussi servir de base pour une future extension vers une gouvernance des données plus globale.
Toutefois, il existe des risques. Un manque de coordination entre les entités peut entraver l’adoption des nouveaux processus. De plus, si le langage commun n’est pas pleinement intégré, cela pourrait entraîner des malentendus et des dysfonctionnements. Enfin, une dépendance excessive à des sources de données externes ou des disparités dans l’adoption des pratiques pourraient limiter l’efficacité globale de l’initiative.
Les initiatives tactiques, bien qu’elles soient plus étendues que les initiatives opérationnelles, peuvent rencontrer des obstacles si elles ne bénéficient pas d’un soutien stratégique. Elles peuvent s’avérer coûteuses à maintenir et risquent de s’essouffler si elles ne sont pas intégrées dans une vision plus large de l’organisation. De plus, les conflits entre services sur les priorités de standardisation et d’harmonisation des données peuvent générer des retards ou des blocages, nécessitant des arbitrages fréquents. (9)
Pour évoluer vers une gouvernance stratégique, une initiative tactique doit démontrer son efficacité à grande échelle et obtenir le soutien de la direction. Cela peut inclure l’intégration de comités de pilotage ou la mise en place de référentiels communs reconnus dans plusieurs entités de l’entreprise. Ce soutien permet de transformer les initiatives locales en pratiques standardisées à l’échelle de l’organisation. (1)
Initiative stratégique
Une entreprise internationale manque d’une vue unifiée des performances de ses entités. Une autre, en pleine transformation digitale, se heurte à l’hétérogénéité de ses données clients, produits et financières. Une multinationale voit la fragmentation de ses référentiels de données l’empêcher de prévoir efficacement la demande client, d’optimiser les stocks et de saisir de nouvelles opportunités de croissance. Enfin, une société est confrontée aux exigences réglementaires croissantes qui imposent une conformité constante en matière de gestion des données. Ces exemples montrent bien que la diversité des enjeux appelle à la mise en place d’un dispositif durable et structuré pour piloter efficacement la gestion des données.
Les silos de données sont à l’origine de ces difficultés. Ils se traduisent par des divergences dans les définitions, formats, référentiels et modèles de données entre les divisions ou départements, ce qui empêche une vue d’ensemble unifiée, que ce soit pour consolider les rapports financiers ou gérer efficacement les stocks. Ces silos entravent non seulement la collaboration et l’échange fluide d’informations, mais compliquent également l’accès rapide aux données et la conformité réglementaire, en introduisant des pratiques incohérentes à travers l’organisation.
La solution consiste à briser ces silos en instaurant un langage commun et en standardisant les structures et formats de données. Cela garantit une meilleure collaboration, un accès plus fluide aux données à travers l’organisation, et une cohérence accrue des informations échangées. Ce dispositif assure également que toutes les normes de conformité, qu’elles concernent la protection, la traçabilité ou l’auditabilité des données, sont appliquées uniformément. Cette approche unifiée permet à l’organisation d’être plus agile dans l’exploitation des données, tout en renforçant la sécurité des données à chaque étape du cycle de vie, de la collecte à l’utilisation.
Plus généralement, une initiative stratégique de gouvernance des données se distingue par son ampleur, car elle couvre les données d’entreprise, sa portée qui touche l’ensemble de l’organisation, et son alignement avec les objectifs globaux. Contrairement aux initiatives tactiques ou opérationnelles, qui peuvent être limitées à un département ou un périmètre fonctionnel, elle est motivée par des enjeux transversaux comme la transformation digitale, la conformité réglementaire ou la monétisation des données, et s’inscrit dans une gouvernance à long terme. (10)
Cette initiative est dirigée par une instance de supervision et d’approbation composée de cadres dirigeants, tels que le CEO, le Chief Data Officer (CDO), et d’autres membres de la direction. Cette instance collabore étroitement avec le Data Governance Office (DGO), qui est chargé de formaliser les processus de gouvernance des données et de mettre en place des rôles stratégiques. Parmi ces rôles, les data owners sont responsables de segments critiques de données, tandis que les data custodians veillent à la sécurité, à la protection et à la qualité des données dans les systèmes de l’entreprise. (8)
La mise en œuvre d’une initiative stratégique passe par une opérationnalisation à plusieurs niveaux. Au niveau stratégique, les comités directeurs définissent les grandes lignes directrices et approuvent les standards. Ensuite, au niveau tactique, ces politiques globales sont déclinées en procédures spécifiques qui répondent aux besoins des différents services. Cela implique une coordination entre les départements pour veiller à une application cohérente des règles et standards définis. Au niveau opérationnel, les data stewards supervisent la mise en œuvre concrète des processus de gouvernance dans les activités quotidiennes des gestionnaires de données. (3) (9)
Dans une initiative stratégique de gouvernance des données, les actions au niveau tactique et opérationnel se distinguent nettement des initiatives autonomes. Les initiatives tactiques autonomes se concentrent sur des périmètres restreints, souvent sans coordination avec l’ensemble de l’organisation. Elles résolvent des problèmes spécifiques mais sont déconnectées des objectifs globaux. À l’inverse, le niveau tactique dans une initiative stratégique assure une application cohérente des standards, avec des comités qui veillent à l’alignement des pratiques sur les objectifs globaux de l’organisation. De même, une initiative opérationnelle autonome cible des besoins locaux immédiats, tandis qu’au sein d’une initiative stratégique, les actions opérationnelles suivent des directives globales, garantissant une gestion harmonisée et durable des données à travers toute l’organisation. Ce travail concerté assure une efficacité à long terme, là où les initiatives autonomes se limitent souvent à des gains ponctuels et locaux.
L’initiative stratégique exige également un effort de formalisation important. Des politiques globales sont créées pour définir les principes de gestion des données à travers l’ensemble de l’entreprise, tandis que des standards uniformisent les pratiques en matière de formats, de référentiels et de définitions partagées. Ces politiques et standards assurent une approche cohérente, et, contrairement aux initiatives plus localisées, garantissent une uniformité à long terme dans toute l’organisation. Ce cadre normatif est validé par des instances dirigeantes pour garantir son alignement avec les objectifs globaux de l’entreprise.
Ces standards sont complétés par des outils tels que des dictionnaires de données, des catalogues de données et des glossaires, qui facilitent la collaboration entre les équipes métiers et IT, tout en favorisant une compréhension partagée des données.
L’outillage nécessaire à cette initiative est également d’une envergure plus importante que dans les initiatives autonomes. Les solutions de Master Data Management (MDM) permettent de centraliser les référentiels d’entreprise, couvrant des informations critiques telles que les données clients, produits ou financières. Les outils de catalogage et de gouvernance des données sont utilisés pour documenter et suivre l’application des standards à travers l’organisation. Enfin, des plateformes d’architecture d’entreprise, des systèmes de protection des données, ainsi que des outils de gestion de la qualité des données (DQM) jouent un rôle clé dans l’assurance de l’intégrité, de la sécurité et de l’exploitation optimale des données. (12)
Les bénéfices d’une telle initiative sont clairs : elle améliore la qualité globale des données, renforce la conformité réglementaire, et permet à l’organisation de devenir plus agile face aux évolutions du marché. En libérant l’accès aux données et en facilitant leur exploitation par toutes les parties prenantes, cette initiative stratégique augmente également la capacité de l’entreprise à innover et à répondre aux exigences externes. Cependant, des défis subsistent, notamment une potentielle résistance au changement de la part de certaines équipes. Par ailleurs, la centralisation des décisions peut réduire l’agilité de certaines unités opérationnelles. Enfin, une dépendance excessive aux technologies de gestion des données peut poser des risques si celles-ci ne sont pas adaptées aux besoins spécifiques de l’organisation ou comportent des vulnérabilités en matière de sécurité.
Les initiatives stratégiques, bien que structurées et unifiées, peuvent rencontrer une résistance au changement de la part des équipes opérationnelles, surtout si les standards sont imposés de manière descendante. Par ailleurs, une centralisation excessive peut nuire à l’agilité de certains services qui nécessitent des ajustements plus rapides dans la gestion des données. La dépendance à des technologies spécifiques peut aussi introduire des risques, notamment en matière de flexibilité et d’adaptabilité si l’infrastructure ne permet pas facilement des évolutions.
Références pratiques
Cette section propose deux références pratiques par catégorie d’initiative. Elle procède d’abord par les références opérationnelles, puis tactiques et enfin stratégiques.
Procter & Gamble et Walmart fournissent des cas client pour des initiatives opérationnelles de gouvernance des données (2) :
- Walmart a instauré un système de surveillance de la qualité des données pour sa chaîne d’approvisionnement, afin de gérer les stocks de manière plus efficace. Cette initiative vise des actions immédiates pour assurer la précision des données des stocks et optimiser les flux, sans intégrer une gouvernance stratégique au niveau global. Les systèmes de surveillance et de gestion des stocks sont régulièrement mis à jour pour éviter des ruptures ou des surstocks, une initiative principalement opérationnelle axée sur l’efficacité opérationnelle quotidienne. (6)
- Chez Procter & Gamble (P&G), l’initiative de gouvernance des données s’est concentrée sur l’amélioration de la qualité des données clients à des fins marketing. L’équipe a mis en place des protocoles de nettoyage de données et de déduplication pour garantir des données propres et fiables. Cette initiative se concentre sur des actions concrètes à court terme, visant la fiabilité des données et la réduction des erreurs dans le cadre d’opérations marketing spécifiques. Elle n’implique pas un alignement stratégique plus large mais répond aux besoins quotidiens de précision des données. (1)
GE Aviation et Wells Fargo fournissent des cas client pour des initiatives tactiques de gouvernance des données :
- Wells Fargo a entrepris une harmonisation des données financières entre ses départements de comptabilité et de gestion des risques pour faciliter la consolidation des rapports financiers. L’initiative se concentre sur des besoins transverses en standardisant les données entre entités sans intégrer l’organisation entière. Ce cas illustre une initiative tactique, où le périmètre dépasse les besoins quotidiens d’un seul service, tout en restant centré sur les besoins spécifiques de consolidation financière. (13)
- GE Aviation a mis en place un programme de standardisation de ses données de maintenance pour garantir une cohérence des rapports et des indicateurs de performance à travers plusieurs centres. Ce programme a harmonisé les pratiques entre départements mais n’a pas nécessité une gouvernance centralisée, alignée avec une vision stratégique de toute l’organisation. En standardisant les pratiques entre différents services, GE a permis une efficacité accrue dans la maintenance des équipements. Cette initiative dépasse le niveau purement opérationnel en ciblant un périmètre interservices, mais elle reste limitée aux besoins immédiats de cohérence et de fiabilité des données dans la gestion de la maintenance. (5)
Enfin, Société Générale et Johnson & Johnson fournissent des cas client pour des initiatives stratégiques de gouvernance des données (4) :
- Société Générale a déployé un programme de gouvernance des données pour répondre aux exigences de conformité réglementaire européenne, incluant la protection et l’auditabilité des données clients. Ce programme couvre tous les départements, avec des standards de qualité et des comités de gouvernance centralisés. Cette initiative couvre toute l’organisation et s’aligne avec les objectifs stratégiques de la banque, garantissant une conformité à long terme en matière de protection des données. (11)
- Johnson & Johnson a lancé une initiative stratégique pour intégrer ses données clients et produits dans une seule plateforme de gouvernance, visant une transformation numérique complète et un accès unifié aux informations essentielles pour toutes les entités de l’organisation. Cette initiative couvre tous les départements et soutient les objectifs globaux de la transformation numérique de l’entreprise, s’inscrivant ainsi dans une gouvernance des données alignée avec la stratégie de croissance et d’innovation. (7)
Conclusion
Les initiatives de gouvernance des données, qu’elles soient opérationnelles, tactiques ou stratégiques, répondent à des besoins distincts et émergent dans des contextes organisationnels variés. Ces approches illustrent la flexibilité requise pour gérer les données en fonction des objectifs spécifiques d’une entreprise et de son niveau de maturité en gouvernance. Contrairement à une perception souvent répandue, les approches opérationnelles et tactiques peuvent fonctionner de manière autonome et préparer le terrain pour une gouvernance plus globale, permettant aux organisations de répondre aux besoins locaux tout en facilitant une éventuelle transition vers une stratégie centralisée.
Les grands enseignements de cet article soulignent que :
- Les initiatives locales peuvent être efficaces et suffisantes pour des contextes spécifiques, sans nécessiter immédiatement une intégration stratégique.
- La transition vers une gouvernance étendue est facilitée par l’adoption progressive d’un langage commun et de mécanismes de coordination interservices.
- La gouvernance stratégique, bien qu’ambitieuse et unifiée, doit s’adapter aux besoins opérationnels pour éviter des rigidités et encourager l’adhésion des équipes.
Ainsi, l’implémentation de pratiques de gouvernance des données se révèle être un processus évolutif, où chaque niveau d’initiative joue un rôle clé en fonction des enjeux organisationnels.
Bibliographie
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