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Margaux Nardini
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« Metaverse », « NFT », « Web 3 », « blockchain »… les mots qui ont fait vibrer les annonceurs du luxe et de la beauté en 2021.
C’est une révolution dans l’industrie du luxe et de la beauté. Une révolution, mais surtout, c’est le branle-bas de combat. Chez certains annonceurs nous voyons naître des « Head of Metaverse & Web 3 », des « CM3O », les équipes CDO se réorganisent. Pour la plupart ayant raté le train du Web 2.0, hors de question de passer à côté du Metaverse et du « web 3 ».
Chacun change alors sa photo LinkedIn par un avatar à son effigie, les grands groupes contactent les Gafam et leurs agences conseils. Chacun veut sa part du gâteau. Et vite! C’est la course à qui marquera le coup. Et plantera son drapeau sur le « Mont web 3 ».
Mais qu’est-ce que le web 3 concrètement ? On y parle blockchain, NFT, cryptomonnaies, produits virtuels, gamings… on y parle skin, Sandbox, Decentraland, Horizon. Mais c’est finalement le « metaverse » qui s’impose comme tête d’affiche du web 3, ce mot étendard qui devient l’obsession de toutes les industries et spécialement celle du luxe et de la beauté. Pour la simple et bonne raison qu’elle offre une surface d’expression jamais vue auparavant, un univers digital fertile où tout devient possible.
En 2022, pas une semaine ne passe sans qu’une marque n’annonce son incursion dans l’univers du metaverse. Progressivement, les géants du luxe s’installent dans ce nouvel univers digital à fort potentiel créatif et business.
Elles saisissent cette opportunité pour faire vivre des expériences à leurs consommateurs. Il s’agit pour les maisons de créer des vêtements ou accessoires de mode à partir de produits déjà existants. Les maisons de luxe connues pour leur réputation et savoir-faire, introduisent un objet luxe digitalisé dans le metaverse. Elles gardent ainsi le contrôle sur leur image, leur savoir-faire et augmentent la visibilité digitale et irréelle d’un produit iconique dans le réel.
Gucci est une des premières marques à expérimenter le metaverse en achetant un terrain dans le jeu blockchain The Sandbox. Gucci vend ainsi des articles virtuels de mode aux joueurs pour que ces derniers puissent porter du Gucci dans le jeu.
C’est une application basique du metaverse et les solutions qu’il propose, à savoir offrir la version virtuelle d’un bel objet réel. Gucci s’insère dans un univers metaverse existant et y propose toute une série de produits virtuels.
Acheter un bien de luxe en version 100% digital est ce que l’on nomme “ Non Fungibles Tokens ”, alias les NFT. D’une manière technique, ils sont certifiés par la blockchain qui garantit leur authenticité, rareté et l’exclusivité – des concepts que l’on ne peut omettre d’évoquer lorsque l’on parle du luxe. Ainsi, un sac Gucci s’est revendu plus cher dans le metaverse que son semblable dans la vie réelle.
Une manière intéressante pour les maisons de cibler une nouvelle génération de consommateurs aussi connectée que influente, et de communiquer via des canaux plus puissants qu’il n’y paraît.
2021 et 2022 sont les témoins d’une avalanche d’initiatives de ce type. C’est un coup réussi pour les maisons de luxe qui s’offrent une belle visibilité, tout en limitant clairement les risques. Elles cochent la case du web 3 via une activation dans un metaverse. Mais le web 3 est plus profond que son mot « porte étendard » qu’est le metaverse.
En effet, explorant d’autres technologies permises par le web 3, certaines marques, un peu plus audacieuses, font le choix du « phygital » produit mi physique, mi digital.
On retrouve notamment la marque Dolce & Gabbana qui proposait en 2021 d’acquérir virtuellement et/ou physiquement l’une des 9 pièces uniques de la collection “Collezione Genezi” sur la plateforme UNXD.
Le NFT devient donc le nouveau « nerf de la guerre » pour les marques beauté et luxe. De grands nombres de marques produisent alors des collections de NFT éphémères pour accompagner des lancements ou marronniers. Givenchy beauty lance une collection exclusive de NFT en 2022 pour le mois des fiertés dont les fonds seront reversés à une association. Et tout récemment, L’Oréal Paris China pour Chinese New Year, lance son NFT de petit lapin doré pour les festivités.
Nous l’avons compris, 2021 et 2022 ont été les années des expériences web 3, NFT et metaverse. Les maisons de luxe communiquent sur leurs activations web 3, démontrant ainsi leur capacité à innover et bien réagir aux tendances digitales.
Mais concrètement, que reste-t-il de ces activations ? Ont-elles réellement façonné l’univers digital de demain ?
Pouvons-nous y voir tout simplement des « coups marketing ». L’ADN dans un article signé Marine Protais datant du 6 décembre 2022, titrait « Le metaverse est-il le Voldemort de la tech ? ». Le mot qui annonçait la « prochaine révolution du Web » en 2021 serait déjà ringardisé après avoir été répété ad nauseam en 2022. Plus personne n’ose le prononcer.
La baisse d’intérêt, ou l’effet de mode passé se caractérise par une baisse d’intérêt dans les recherches Google. La courbe de recherche metaverse et mots clefs associés n’a cessé de décroitre depuis janvier 2022. Comment expliquer alors que les sujets metaverse soient passés d’omni présent dans les discussions des corporates, métiers des communicants, digitaux ou marketeux ; à un mot galvaudé, qui agace certains professionnels du métier.
Le web 3 est apparu comme une solution toute trouvée aux problèmes d’un web 2.0 qui s’essoufflait. Le Web 3 avec en tête d’affiche ce mot « metaverse » qui est ainsi devenu l’espoir d’un renouveau pour les entreprises en mal d’innovation, mais également l’espoir d’un renouveau pour le Gafam.
Mais un problème de notion se pose : Les amalgames autour des outils et expériences qu’englobe le web 3. On parle de « metaverse » pour tout qualifier. Or le metaverse n’est pas né avec le web 3, il est déjà existant depuis un moment sur le web 2, c’est le cas des plateformes telles que Roblox ou Fortnite. Les frontières sont fines et compliquées à appréhender pour les acteurs corporate. Le metaverse devient buzzword pour qualifier à peu près tout ce qui touche au web 3. Utilisé et réutilisé pour toutes sortes d’espaces virtuels ; la définition s’est galvaudée et a perdu tout son sens.
De plus, lorsque le géant des Gafam Facebook se renomme « META », cela impose aux acteurs sa suprématie sur cette technologie. Son ambition de créer un environnement metaverse, à travers son projet de metaverse Horizon Worlds, contribue au ralentissement de la percée du metaverse. Sa première version datant de décembre 2021 est très décevante. Les performances Meta restent à prouver, et nombreux sont les retours d’expériences négatifs concernant Horizon.
Fin octobre, le Reality Labs, qui gère le projet Horizon chez Meta, a annoncé une perte de 3,6 milliards de dollars au troisième trimestre.
Le problème d’avoir eu une approche suprématiste c’est que le metaverse s’est vu amalgamé à Meta et cette expérience d’un monde virtuel plutôt en échec. Les graphismes, la fluidité, le gameplay, tout est décevant. Bien moins abouti que les univers metaverse du Web 2. A partir de là, le mot « metaverse » s’est vu déprécié par les professionnels du milieu et les utilisateurs les plus aguerris.
Concernant le lien entre metaverse et luxe, même si le mot était sur toutes les lèvres et dans toutes les discussions, la réalité est que les maisons de luxe sont restées relativement prudentes ou se sont lancées trop rapidement dans l’essai, avec l’envie de saisir une opportunité, laissant ainsi quelques initiatives metaverse très déceptives.
« Le metaverse est mort. Vive le metaverse ? »
L’effet de mode est passé ; entraînant avec lui un grand nombre de coups marketing et activations superficielles. Il est temps pour le metaverse de se réinventer. De mûrir également. Le metaverse n’est plus dirigé par des startups et alimenté par des financements à risque. Bon nombre des plus grandes entreprises sont désormais en concurrence pour proposer des produits de réalité virtuelle et réalité augmentée. Pour les maisons de luxe le web 3, metaverse et blockchain, 2023 signera l’année des grands projets. Dépasser le coup marketing pour installer et proposer des services longs termes à leurs consommateurs.
Si 2021 a été l’année où le Web 3 a enflammé la toile, 2022 c’est l’année du
test and learn: entre activations marketing coup de buzz ou coups d’essais ratés. 2023 s’annonce alors comme l’année de la maturité : le web 3 et le metaverse vont officiellement gagner du terrain.
Il y a plusieurs indicateurs du changement en faveur du web 3 et de l’industrie du luxe.
Il est important de noter que les générations Z et Y devraient représenter près de la moitié du marché de la mode de luxe d’ici quelques années. Or, auprès de ces populations les activations metaverses continuent de progresser. La façon dont nous pensons aux technologies émergentes devient beaucoup plus ancrée dans le quotidien. Pour ces générations, qui sont des digital natives, le web 3 façonne une nouvelle réalité où vie physique et vie virtuelle sont indissociables. L’estompement du virtuel et de la réalité est une tendance qui va se poursuivre, et cela est essentiel à l’adoption de l’univers metaverse par le grand public.
C’est donc une belle opportunité pour les marques de luxe qui cherchent à créer des expériences mémorables pour leurs consommateurs, tout en garantissant la préciosité et unicité de leurs produits de luxe.
La dimension phygitale d’une offre de luxe crée un pont entre les environnements en ligne et hors ligne, qui la rend plus accessible aux nouveaux acheteurs tout en assurant l’avenir de la marque.
Il existe 4 mots, que nous retiendrons, qui créent un lien entre consommateurs du luxe et marques de luxe : Expérience, authenticité, traçabilité et durabilité.
Ces éléments seront le cœur du développement des activations web 3 et metaverse du luxe en 2023.
Les expériences de shopping virtuel immersif dans le metaverse ont débuté en 2022, permettant aux consommateurs d’essayer des biens de luxe par le biais d’activités ludiques et immersives. Dans un univers qui valorise l’imagerie luxe de la marque. 2023 sera le tournant de cette tendance expérientielle. Revalorisant l’expérience retail et l’achat, clef pour les maisons de luxe. Le metaverse sera la continuité d’une expérience « boutique » élevant le modèle traditionnel à quelque chose de plus immersif, innovant, engageant et interactif.
Dans le « 2022 Metaverse Fashion Trend Report » de Roblox, publié en novembre, 2022 près de trois personnes interrogées sur quatre ont déclaré qu’elles dépensaient de l’argent dans la mode numérique, et plus d’une personne sur quatre a déjà dépensé entre 20 et 100 dollars pour un seul article virtuel.
À mesure que le metaverse se démocratise, les consommateurs passent la frontière du l’irréel vers le réel en affichant leurs objets de luxe sur leurs avatars dans la metaverse sur diverses plateformes tels que Decentraland, Roblox, ou même bientôt Instagram. Objets de luxe qui seront tout autant appréciés dans le monde réel. Une aubaine pour les marques de luxe ou les market place fashion qui vont pouvoir réinventer une nouvelle manière de consommer.
C’est le cas du créateur Peter Dundas qui signe une très belle activation web 3 en collaboration avec le market place digital DressX pour la plateforme Roblox.
La collection DressX x Dundas Party Drop se compose de plusieurs vêtements virtuels inspirés de diverses célébrités et de leurs looks emblématiques. On se rappellera notamment la fabuleuse Beyoncé et de sa performance aux Grammy Awards. Chaque vêtement hyper réaliste s’adapte à tous les types d’avatars, encourageant l’inclusion et la diversité au sein du metaverse et de la communauté de la mode au sens large.
Autre caractéristique de l’univers du luxe : l’authenticité et traçabilité.
En effet, la constante évolution du web 3 favorise la mise en place de programmes d’authenticité et de revente des produits de luxe achetés en ligne ou dans le réel.
En effet, aujourd’hui le web 3 et l’amélioration de la technologie blockchain offrent de vrais outils qui permettent de prouver l’authenticité des biens, diminuant ainsi les possibilités de contrefaçon. Ainsi, grâce au web 3 les maisons de luxe pourront assurer la rareté et l’authenticité de leurs biens. C’est aujourd’hui le cas de géants de l’industrie du luxe tels que LVMH, Prada ou Richemont qui mettent en œuvre la technologie blockchain dans leurs activités. Par exemple, Aura Consortium promeut une solution blockchain mondiale unique ouverte à toutes les maisons de luxe. Chaque marque inscrite peut alors y référencer un article, qui est du coup doté d’une puce d’identification qui peut ensuite être scannée afin de révéler l’historique du bien. La marque de montres Vacheron Constantin utilise Arianee, une solution blockchain, pour enregistrer ses montres fournissant aux acheteurs un passeport numérique qui peut être transféré entre propriétaires. Ce processus crée un lien anonyme entre le consommateur et la marque de luxe.
Terminons par la durabilité. Autre qualificatif essentiel d’un bien de luxe représentant un fort potentiel pour les marques et le web 3.
En effet, les produits phygitaux doivent s’intégrer dans une logique axée sur la durabilité. Les consommateurs du luxe montrent de plus en plus d’intérêt à ces produits dématérialisés.
Porsche Chine, le géant de l’automobile de luxe dévoile sa toute première collection de NFT en janvier 2023. La collection « 911-Dreamer », limitée à 996 pièces, permettra à ses détenteurs de changer le thème et de créer un habillage unique pour leurs objets de collection. Les propriétaires de ces tokens recevront également plusieurs avantages, notamment des cadeaux physiques et des invitations à des événements IRL exclusifs.
Ou quand le web 3 réinvente le CRM. La gestion de la relation client est un moyen de récompenser les meilleurs clients pour leur engagement, utiliser Web 3 pour gérer son CRM est une façon intelligente de maintenir cet engagement au plus haut niveau. Des solutions comme celles développées par l’entreprise française Bulldog permettent justement aux marques de créer facilement des programmes de fidélité Web 3.
Le metaverse est mort. Vive le metaverse !
2023 s’annonce comme une année explosive pour luxe et web 3.