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Bernard RAMANANTSOA
(ramanantsoa@hec.fr) - Directeur général honoraire d'HEC Paris
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Quels sont, selon-vous, les principaux enjeux et opportunités de la crise du COVID-19 dans le secteur des écoles de commerce ?
Je crois tout d’abord que personne ne peut réellement anticiper les conséquences d’une telle crise. Certains pensent même qu’on vit une discontinuité et qu’on devrait plutôt parler de catastrophe, au sens de René Thom : les structures, les fondations de notre société sont peut-être atteintes et le système éducatif avec. Il importe donc à prendre de grandes précautions, quand on s’interroge sur notre futur.
À court terme, une chose apparait certaine : les écoles de commerce et l’enseignement supérieur en général ont appris à mieux gérer la pédagogie à distance. Il s’agit là d’un élément crucial, qui semble peu contestable.
La période que nous venons de vivre a été l’occasion de déployer un ensemble de projets nouveaux et de projets moins nouveaux, déjà présents dans les cartons mais qui n’avaient pas pu être développés auparavant pour des raisons diverses. Oui, « on » a beaucoup appris avec la crise du Covid-19. La « continuité pédagogique » a été au centre des débats et ce n’est pas fini : les écoles devront continuer à s’adapter à ce qui est en fait une révolution.
Mais cela ne va pas concerner que la pédagogie. Un marketing digital plus sophistiqué sera également nécessaire pour améliorer le processus de recrutement des étudiants et assurer leur placement au sein des entreprises. Plus globalement, les relations des écoles avec leurs parties prenantes stratégiques vont s’inscrire dans une logique de plus en plus numérisée.
Si on réfléchit à plus long terme, on verra probablement une redistribution des positions concurrentielles. Je vous parlais de discontinuité. On devrait peut-être parler de ruptures. J’en vois deux possibles.
Comment vont évoluer les institutions dont les revenus dépendent de façon significative de la formation continue ? Les entreprises clientes vont-elles accepter de faire plus de distanciel ? Si oui, où sera le curseur entre présentiel et distanciel ? Quel sera l’impact de ces nouvelles modalités pédagogiques sur le pricing ? Question encore plus sensible : ces institutions, qui étaient les plus robustes, il y a encore six mois, sortiront-elles fragilisées, de cette période ?
La deuxième rupture possible concerne le paysage concurrentiel mondial. Comme l’histoire le montre, chaque fois qu’on vit une rupture de cette ampleur, il en ressort des opportunités. Il se pourrait par exemple qu’on assiste très vite, grâce au recours amplifié au digital, à une reconfiguration des voies d’accès aux marchés lointains. Qui saura en profiter ? Pas tout le monde, c’est certain. Les institutions les plus attractives aujourd’hui, avec une marque forte, ne profiteront-elles pas de cette redistribution des cartes pour attirer encore plus les tout meilleurs candidats du monde entier et devenir encore plus « dominantes ». Que restera-t-il aux autres ? C’est une vraie question.
Biographie de Bernard RAMANANTSOA
Bernard RAMANANTSOA est titulaire du diplôme d’ingénieur de l’ »École Nationale Supérieure de l’Aéronautique et de l’Espace » (Sup’Aéro), d’un MBA d’HEC, de deux DEA en Sociologie (Université Paris Diderot) et en Histoire de la Philosophie (Université Paris Sorbonne), et d’un Doctorat en Sciences de Gestion (Université Paris Dauphine).
Chevalier de la Légion d’Honneur. Officier de l’Ordre National du Mérite. Chevalier des Palmes Académiques. Officier de l’Ordre National Malgache.
Il débute comme maître de conférences à l’Ecole Nationale Supérieure de l’Aéronautique et de l’Espace, puis intègre la SNCF où il deviendra responsable de la Division Marketing « Grandes Lignes » de la SNCF.
Il rejoint le corps professoral d’HEC en 1979 comme professeur de Stratégie et Politique d’Entreprise, spécialiste d’éthique et de culture des entreprises et défenseur d’une approche ouverte et multiculturelle du monde de l’entreprise. Il deviendra Directeur Général d’HEC en 1995 et sous sa direction, jusqu’en 2015, l’école prendra une dimension résolument internationale.